Ce qui n'est pas écrit dans le texte dédié aux
Incognitos, c'est la part belle aux oiseaux. En réalisant ce catalogue de dessins, en couleur, il devenait évident que les êtres ailés soient en couverture. Ils m'accompagnent, m'inspirent, j'en élève et les vois grandir. Ils font à leur manière la même chose. Ils me regardent, témoins quotidiens et nous conversons. Un de mes albums musicaux en a été la dédicace (
Pépino) Dans mes lectures de George Sand, hasard, je me suis aperçue que cet écrivain avait cette même admiration. Alors je cherchais ses mots en vain. Voici ce que je trouvais :
"L'oiseau, je le soutiens, est l'être supérieur dans la création. Son organisation est admirable. Son vol le place matériellement au-dessus de l'homme, et lui crée une puissance vitale que notre génie n'a pas pu encore nous faire acquérir. Son bec et ses pattes possèdent une adresse inouïe. Il a des instincts d'amour conjugal, de prévision et d'industrie domestique; son nid est un chef d'oeuvre d'habileté, de sollicitude et de luxe délicat. C'est la principale espèce où le mâle aide la femelle dans les devoirs de la famille, et où le père s'occupe, comme l'homme, de construire l'habitation, de préserver et de nourrir les enfants. L'oiseau est chanteur, il est beau, il a la grâce, la souplesse, la vivacité, l'attachement, la morale, et c'est bien à tort qu'on en a fait souvent le type de l'inconstance. En tant que l'instinct de fidélité est départi à la bête, il est le plus fidèle des animaux. Dans la race canine si vantée, la femelle seule a l'amour de sa progéniture, ce qui la rend supérieure au mâle; chez l'oiseau, les deux sexes, doués d'égales vertus, offrent l'exemple de l'idéal dans l'hyménée. Qu'on ne parle donc pas légèrement des oiseaux. Il s'en faut de fort peu qu'ils ne nous valent; et, comme musiciens et poètes, ils sont naturellement mieux doués que nous. L'homme-oiseau, c'est l'artiste."
(George Sand, Histoire de ma vie, 1847)
De mon côté, l'accès à la contemplation est peut-être ce que m'ont appris les êtres ailés. Ils symbolisent l'imaginaire, l'intelligence et la beauté et sont des miroirs de nos fragilités, dans ce que nous avons acquis de prédation, ne serait-ce que dans l'invention des cages, de la capture, dans ce qu'il y a en tension avec l'envol et la liberté : le pouvoir magique de voler. L'éthologie et les découvertes outre-atlantique sur la vie domestique avec des oiseaux ont été, (au-delà des à prioris sur la fantaisie de ce hobby, qui n'en est pas un, pour ma part) un loisir alors vital. Loisir pour l'oiseau me semble être plus honnête afin de le rapprocher de l'humain et ses passe-temps favoris : Le mot, dérivé du verbe latin licere (être permis), signifie, au début du XIIe s., la " liberté", l'"oisiveté". Puis, à partir du XVIIIe s., il évolue vers le sens de"distraction". Également, je distrais les oiseaux, étant convenu entre nous, que nous sommes en cages respectives (nos habitats), et que, d'êtres captifs, d'égal à égal, nous passons le temps à siffler, barvarder en perruches, si ce n'est dessiner et déchiqueter du papier. Et dans notre monde contemporain : enlever les touches du clavier d'un ordinateur est un jeu d'adresse et de vive désobéissance assez jouissif.