Dai Nippon-jin, 大日本人, image du film du réalisateur japonais Hitoshi Matsumoto, 2007

Big Man Japan (japonais : Dai Nippon-jin, 大日本人) est le premier long-métrage du réalisateur japonais Hitoshi Matsumoto, sorti en 2007 au Japon. Il s'agit d'une parodie de films de kaijū (monstres géants), qui en présente une version « réaliste » et triviale, au détriment du personnage principal, joué par Hitoshi Matsumoto lui-même.
Big Man Japan commence comme un film documentaire consacré à Masaru Daisatō (Hitoshi Matsumoto), un marginal japonais détesté de ses voisins, qui est régulièrement appelé par le gouvernement pour combattre des monstres géants qui apparaissent dans l'archipel. Pour cela, il se rend dans une centrale électrique où il se transforme lui-même en géant. Son grand-père, maintenant en maison de retraite, avait occupé le poste, mais depuis cette époque sa fonction a perdu tout prestige : les audiences télévisées de ses exploits sont déplorables et son attachée de presse l'oblige à se financer grâce des publicités peintes sur son corps. Une série de fiascos contre des monstres particulièrement grotesques achève de le décrédibiliser (une sorte de bébé, une paire de monstres qui ne songe qu'à s'accoupler, etc.)
Alors que le début du film se présente comme un mélange de prises de vues réelles et d'images de synthèse, ses dernières minutes mettent le comble à la déchéance du personnage en étant tournées dans un décor en carton-pâte et des costumes rappelant la série télévisée des années 1960 Ultraman : une famille de super-héros américains intervient pour battre le bébé géant sous les yeux de Big Man Japan terré derrière un immeuble.

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Très loin, mais pas si loin du cinéma d'Ozu, je poursuis l'exploration du cinéma d'Hitoshi Matsumoto avec son premier film de 2007 (voir Le samouraï sans épée). Toujours dans une réflexion de la société nippone, ici, d'aujourd'hui (ses inspirations sont puisées dans le manga, la série B, le jeux vidéo… ), plus loin de la nostalgie des années 50, nous sommes dans un scénario où la survie et le combat deviennent un métier difficile. Le réalisateur est le protagoniste du film. L'assemblage documentaire, interview et actions s'entremêlent et met en scène la vie d'un personnage banal, à travers des phrases toute aussi banales ("Comment se nomme votre chien ? Aimez-vous le froid ?) Mais je ne reviendrais pas là sur l'utilité des phrases inutiles, d'autant plus que dans ce film, sont soulevées des questions existentielles. Superbes réalisations inventives sur les différents Kaijū, ces bêtes étranges aux différents pouvoirs qui viennent troubler la ville. Ils sont parfois idiots, parfois débiles, tandis que le héros déchu, en les combattant, regagne la confiance des habitants de Tokyo. La trame de fond : l'insertion difficile dans la société contemporaine, le problème de l'emploi, l'éclatement de la cellule familiale (le héros est séparé de sa femme et de sa fille de 10 ans), la perte des traditions, les relations complexes avec la Corée et les États-Unis, la compétitivité. La dernière scène, où des copies d'Ultraman achèvent un monstre coréen, avec des costumes ridicules, insère des effets spéciaux maladroits et grotesques en souvenir de ceux des années 60-70, et décalés au regard des autres monstres patibulaires aux figures protéiformes et fines, présentées depuis le début. Les scènes finales des films d'Hitoshi Matsumoto sont toujours séparées de l'histoire et ne terminent pas le film, dans le sens qu'elles apportent une réincarnation ailleurs, un au-delà qui présume d'une suite, d'une vie après la mort. Le héros timide, réservé ne ressemble pas au protecteur d'une ville et c'est dans ce décalage grave et comique, (autoportrait du réalisateur marginale qui ne sauvera pas le cinéma ?) qu'opère son esthétique si singulière. S'il est, dans le film, un clochard mis au ban de la société, quadragénaire qui sombre dans la dépression et la marginalité, ce mélodrame foisonne de batailles parodiques, où le terrifiant s'accompagne volontiers d'un fou rire, lorsque le gag l'emporte. Les créatures aux connotations sexuelles, organiques et hilarantes, menacent le Japon. Il tempère afin qu'elles ne brisent pas tous les immeubles, les routes… Ce sens de l'absurde, met à distance le pouvoir, l'histoire, démystifie les invasions également, les catastrophes et l'ennemi. C'est une remise à niveau de l'histoire et ses drames par des combats de titans pathétiques. Un film expérimental dessiné par un humoriste délicieusement fou.