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dimanche 10 décembre 2023

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Photographies © Sonia Marques

Journal d'une pie (extrait)

Je ne dormais qu'un seul œil. Je parvenais toujours à trouver un petit endroit pour dormir, personne ne peut savoir où. Il pleut beaucoup et il fait froid, les journées sont quasi funestes, le sommeil m'est indispensable, il restaure mon organisme, et assure le bon fonctionnement de mon cerveau. Je suis encore jeune, cela favorise aussi ma croissance, j'apprends toujours tant de choses, en ce moment, je découvre l'hiver et les autres animaux, les rivières et les nids à découvert, les corniches, les creux où s'abriter, les arbres touffus qui n'ont pas perdu de feuilles les conifères évidemment. Mon stress se réduit en dormant. Pour l'assurer, je me dois de rechercher la meilleure place pour ma nuit, très loin des prédateurs. Je ne dors que d'un œil, une partie de mon cerveau reste aux aguets. Nous avons, une petite singularité, chaque œil ne communique qu’avec une moitié du cerveau. Notre sommeil est hémisphérique unilatéral. Je repose une moitié de mon cerveau, puis l’autre afin de surveiller les alentours et réagir vite en cas de danger. En équilibre sur un fil, une branche, un rien du tout. Funambule, je suis, je reste, agile et fugace, mais tenace sur mes pattes qui tiennent bon. Mes tendons fléchisseurs bloquent les serres en position fermée lorsque je m'endors. C'est un peu l'inverse des êtres humain, autant serrer un objet leurs demande un effort, autant nous, aucun. Lâcher un objet, demande aux êtres humains un lâcher prise sans aucun effort, autant, nous pour lâcher, c'est un effort, si bien que nous serrons bien fort. Je ne peux pas tomber, car mes serres me retiennent.

La nuit soudainement encombre toute la nature, le silence se fait entendre. Tous les oiseaux se taisent, ou presque, on peut entendre les nocturnes, un hiboux par exemple. Juste avant la nuit, je me lisse les plumes et je chante avec mes amies les pies. Je suis déjà à l'abri des prédateurs.

Nous sommes homéothermes. La température de mon corps est constante. Mes plumes gardent emprisonnée la chaleur, elle ne s'échappe pas, elles sont formidables. La période de mue cet été que j'ai connue, favorisait la pousse de superbes plumes dont je prenais soin de les étoffer pour l'hiver. J’ébouriffe mes plumes avant de dormir, j'en ai peut-être plus de mille mais qui les a comptées ? Cela n'existe pas les chiffres chez nous ! Mes plumes sont inertes, elles ne possèdent ni vaisseaux sanguins, ni peau, ne dissipent pas la chaleur de mon corps. Au contraire, elles forment une barrière qui emprisonne la chaleur près de ma peau. Ma tutrice me disait que c'était donc un effet proche de celui lorsqu'elle dormait sous une couette de plumes, ou portant un duvet sur le dos. Sous mon épiderme il y a une zone de stockage de mes graisses, ce qui donne une fonction isolante. Mais je disais à ma tutrice, que je ne connais pas la sudation. Il m'est arrivé de la voir transpirer, ces jours-ci, elle a attrapé un bon rhume, nous, nous sommes dépourvues de glandes sudoripares. À mon tour de la réchauffer sous mon aile. J'avais ce petit chapeau de pluie, assez décoiffée, ma tutrice complètement mouillée, car je n'aime pas les parapluies, mes copines les autres pies sommes là avec elle afin de papoter un peu. Parfois une lumière singulière dorée et rosée apparait lors de nos échanges, puis l'atmosphère lugubre reprend son décor tamisé de bas résilles noirs , sur un sol de flaques d'eau grises et argileuses, et nous disparaissons toutes, les pies, ma tutrice... et moi.

J'ai parfumé ma couche De myrrhe, d'aloès et de cinnamome.
Je serre bien fort.
Je m"endors.





Photographies © Sonia Marques


Photographie de la crèche limousine en orfèvrerie émaillée réalisée par les artistes Léa Sham's et Alain Duban. Elle représente 9 saints vénérés en limousin.

samedi 14 décembre 2019

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