Le bonheur n'existe pas, pensais-je, en faisant autre chose que penser.

Baloo dit, il en faut peu pour être heureux, dans Le livre de la jungle de Disney… The Bare Necessities, nous sommes dans les années 68…
Inventer des besoins pour des personnes qui n'ont pas ces besoins, telle est la société de consommation…

Autre dimension, un poème, celui de Rudyart Kipling (If) publié en 1910.

Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles
Sans mentir toi-même d’un mot ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,




Alors le bonheur n'existe pas, pensais-je.
Si celui-ci est approché, ce n'est que dans le bruissement du malheur qu'il devient vrai.
Connais-tu le bonheur ? Seulement si je m’efforce de le voir devant moi ou si je le perçois autour de moi. Ce sont les choses et les évènements, les infimes sensations, que je peux percevoir, et pas forcément en sollicitant la vue seule, qui sont indiciels de bonheur. Mais le bonheur n'existe pas, il existe pour vendre un produit, un séjour en vacances, un standing de vie, un don déculpabilisant pour les plus démunis…

Non le bonheur ne s'apprécie qu'au détour d'un malheur, mais longtemps après. Et c'est une profonde sensation éphémère, mais que l'on peut prolonger en y travaillant un peu. Le travail est aussi un éventuel bonheur, tout dépend de la valeur et du sens que l'on peut y percevoir, sans retour sur investissement. Gestes et pensées alliées et fatigues saines, tant de choses. Les addictions ne sont pas sources de bonheur, mais un enivrement, l'anesthésie du bonheur.

Baloo avec ses bananes, il fait la planche sur le dos, car il en faut peu pour être heureux. C'est une image du bonheur et l'enfance a l'art, comme les animaux que je connais, de s'approcher de ce bonheur et des bananes, sans les compter. Se focaliser sur une saleté quand on a tout ce qu'il nous faut autour, en demander toujours plus aux autres, qu'ils ne peuvent donner, alors que nous n'avons pas besoin de le faire.

Les miettes sont-elles pour les Dieux ou pour les morts ? S'il ne faut pas les ramasser. C'est tout simplement que ce qui tombe à terre était considéré comme source de contamination et que l'éducation forme à ne pas manger ce qui est tombé à terre.
Il en est que laisser les choses qui tombent et ne pas les ramasser, c'est prendre la mesure de ce qui est et devait être. Oui, on jettera les pots cassés dans les poubelles appropriées, on nettoiera le sol maculé de grenade ou de fruits de la passion, pour y circuler de nouveau sans glisser, mais ce n'est pas grave. La perte et la saleté sont nécessaires au laisser tomber. Il faut perdre pour gagner. Et lorsque l'on doit se nourrir, sans rien avoir depuis des jours et des nuits, alors ramasser les miettes, les Dieux et les morts, nous les donnent volontiers. Puisque celui ou celle qui a laissé tomber, laisse tomber pour autrui.

Jamais notre vie intrinsèque, chaque organe, ne nous envoie un message en nous informant : je vais bien, de sorte que nous n'allons jamais bien, même quand tout va bien parce que nous sommes envahis par des messages qui nous signalent que tout va mal et que ce que l'on fait n'est jamais assez. Les objectifs ne sont jamais atteints et pourtant, dans la vérité du moment, à l'instant même où tout va mal : nous allons très bien par ailleurs. Comme la douleur est la plus ressentie, nous pensons ne pas aller bien. Dans l'idée du carpe diem, quand tout arrive d'un coup, un tas de difficultés, le carpe diem sort une carte intéressante : tout est là, chaque chose qui se présente est une occasion de vivre vraiment.

Souvent je me dis que résoudre, cela nécessite pas mal de ressources, chaque jour, des problèmes surviennent mais s'il n'y pas de force, les problèmes se résolvent, car les choses arrivent toutes. Les laisser passer résout beaucoup de problèmes, non pas que l'on s'absente, mais au contraire, que l'on soit aussi présent que les choses, elles ne sont pas subies mais vécues, elles sont.

Le bonheur n'existe pas, s'il est toujours à venir, alors il ne sera.
S'il se présente, on ne l'a pas souhaité.
Mais que fais-tu bonheur ?
Je ne t'ai pas invité aujourd'hui !
Autre chose : ne pas accueillir le bonheur lorsqu'il se présente c'est fermer la possibilité qu'il revienne.
Alors on l'installe quelque part,

on lui sert un café et on le regarde,
il n'est pas heureux le bonheur,
il a plein de choses à raconter tristes,
et pourtant c'est le bonheur qui est là,
c'est d'être vivant que de le percevoir,
et puis il s'oublie,
rien ne le remplace,
la nostalgie prend sa place,
mais non il ne partira jamais,
puisque les êtres et la nature,
ce que l’artificiel fait de mieux,
tout est là,
surtout,
ne jamais le toucher,
le bonheur, il n'existe pas.