David Hammons, Bliz-aard Ball Sale, 1983, New-York

David Hammons est un artiste américain né en 1943 à Springfield dans l'Illinois. Il travaille dans une variété de médias, y compris la performance, l'installation, la sculpture, la gravure, entre autres modes de production. Une grande partie de son travail intègre au début le corps et des matériaux ordinaires, organiques, cheveux, os de poulet, graisse, instruments de musique, pelles, sacs en papier. Avec des objets fonctionnels David Hammons crée un art qui résonne avec les jeux de mots et l'humour de l'art conceptuel avec une approche spirituelle et la présence corporelle et sociale de la vie afro-américaine.
Sa célèbre action, des boules de neige à vendre, Bliz-aard Ball Sale, en 1983, se trouvait sur ​​la rue à New York, à côtés d'autres vendeurs sur Cooper Square. David Hammons vendait des boules de neige dans différentes tailles, aux passants. En attribuant une valeur et apparaissant à rechercher un profit à partir d'un banal objet éphémère (la neige fond), David Hammons attire l'attention à la fois sur la nature arbitraire du marché de l'art et les conditions financières précaires de la classe ouvrière New-Yorkaise.
Sa pratique unique qui mêle art de l’assemblage, culture populaire, musique de jazz, mémoire de l’esclavage et identité noire, lui permet de rester insaisissable. Ses œuvres sont des contributions incontournables à l’histoire de l’art contemporain et des influences majeures pour plusieurs générations d’artistes depuis les années 1970.
Il voyage en Italie et collabore avec des artistes italiens, ce qui lui a donné l'occasion de partir dans toute l'Europe et à la rencontre de son public artistique comme dans les Magiciens de la Terre au Centre Georges Pompidou (exposition légendaire !) et à la grande Halle de la Villette à Paris en automne 1989.
L'année dernière, le 10 décembre 2014, le Crédac (Centre d'art contemporain d'Ivry), donnait une conférence d'Elvan Zabunyan (David Hammons, sur les traces d'une partition urbaine à la médiathèque d'Ivry) qui s'intégrait dans une réflexion sur les liens parfois méconnus entre l’histoire de l’art contemporain, le contexte colonial et l’héritage de l’esclavage aux États-Unis et dans les Caraïbes. Je n'y ai pas assisté mais je remarque qu'Elvan Zabunyan (historienne de l’art contemporain, travaille depuis le début des années 1990 sur les problématiques issues des cultural studies, des théories postcoloniales et des études de genre), depuis sa publication "Black is a color, une histoire de l’art africain américain"  (aux édition Dis Voir, 2004) reste une référence dans les deux écoles d'art où j'ai le plus enseigné, souvent contextualisé selon les étudiants et le climat de la ville, de l'école, du pays. Mes apports de plus en plus minoritaires, les références auxquelles j'aspire, de plus en plus effacées, ma voix de moins en moins audible. Les boules de neige seront toujours là et la fonte des neiges n'a pas besoin de voix pour nous impacter climatiquement, mais d'actions. Ces jours-ci, les élections et l'emprise des vieux extrémistes politiques français sur nos valeurs, des votants contre l'art, contre l'autre, contre la différence, successivement après la folie meurtrière des jeunes extrémistes français. Triste pays où nous vivons, qui ne connait l'inconfort et la misère et méprise la poésie, un pays qui a peur, celui où j'ai eu accès aux plus belles expositions, des moins valorisées aux plus soutenues, et où je vis, tout ce qui fait que j'aime l'art et l'enseignement, la création et la liberté des formes artistiques. Un pays qui m'a appris beaucoup de l'art, et auquel je retransmets ce que je peux, de moins en moins ce que je veux, je pense être juste, au regard de mon expérience.
- Sommes-nous si peu à reconnaître ses valeurs à les défendre ?
Des amis intellectuels et artistes que je n'entends plus, des cachés entrés en résistance, des muselés, des absents, des partis ailleurs, des isolés, des interdits de manifester, des S.O.S. sans réponses, le désengagement de tout, des interdits de penser de se réunir sur des idées. Seules les réunions festives restent autorisées pour une image surannée de liberté d'expression, exposée aux vents mauvais.
- Sommes-nous si volontaires pour faire semblant ? Pour être exposés aux vents mauvais ?
De l'indépendance d'esprit, nous avons besoin.

David Hammons, Bliz-aard Ball Sale, 1983, New-York

Je repensais à cet accès, et pour ma part, il vient des MJC, ces Maisons des Jeunes et de la Culture, ces lieux initiés des mouvements issu de la résistance de 1944. Là où ma mère m'y a inscrite et y participait, en banlieue, dans les années 70, elles sont devenues des lieux de résistance à l’isolement, à l’intolérance, à l’individualisme, à la morosité, au formatage, ont favorisé l'épanouissement personnel, les rencontres, l'amitié, l'amour, les échanges avec des jeunes si différents, tournés vers des projets communs, des valeurs humaines et riches qui nous rassemblaient au-delà de tout. J'ai tout appris, enfant, de la lecture, de la musique du monde, des métissages culturels, de la danse contemporaine... J'y ai invité des amis, à participer, à apprendre, depuis la capitale ils venaient se nourrir, voir, écouter, des spectacles, danser, dire, dessiner. C'est un beau bagage et il est précieux, une denrée rare dans d'autres contrées. Dans mon parcours, bien avant les grandes villes, la capitale, j'y ai pris goût bien avant, à tout ce qui se joue dans le domaine artistique et se diffuse dans tous les autres domaines. Il est long le chemin et plein de traverses.
J'ai croisé tant de David Hammons, inconnus aux yeux du milieu de l'art, aux visages différents, aux idées singulières, aux styles et attitudes multiples, des jeunes femmes, filles, des danseuses avec des espoirs, des beautés saisissantes, d'Afrique, du Nord de l'Europe, des pays que je n'ai jamais visité, tous comme moi, avec juste le souhait d'apprendre, de créer, dans une économie de moyen, qui ne craignent ni le dépouillement, ni l'ornement, la décoration, ni l'invisibilité médiatique des instants partagés. Une intensité qui dure finalement dans le temps. Mon esprit est contemplatif.